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Numéro 61 - 07 septembre 2016
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Le Pasolini d' Abel Ferrara

Pasolini est mort, vive Pasolini !

Le dernier jour de « Pasolini» selon Abel Ferrara

 

 

Mercredi 7 janvier, 11h30, j'ai fini le travail, je vais au café. Je vais au café en attendant la séance du film que je veux voir : "Pasolini".

Cigarette dans une main et téléphone dans l'autre, j'apprends épouvantée que Charlie Hebdo a été attaqué et que des journalistes sont morts. Noir. Je préviens mes amis. Noir. Noir à tous les étages.

Je n'ai plus envie d'aller au cinéma. Je ne veux plus penser. Je regarde ma tasse de café avec peur. Puis, peu à peu, chaque minute lourde et lente succédant à une autre encore plus lourde et plus lente,  j'ai l'intuition que dans ce brouillard qui commence à peine à s'installer, "Pasolini" doit être sur mon chemin comme une petite...luciole...pour m'aider à comprendre ce qu'il s'est passé.

J'y vais comme ça. Je ne connais quasi rien de cet artiste. Simplement sa mort, terrible et non-élucidée et son passé de libre penseur contestataire qui ne lui a pas fait que des amis...

Le film se passe. Il fait toujours noir. Je n'ai pas la tête à cela, je n'ai rien compris. Noir sur écran noir. Le monochrome de l'incompréhension.

Notre rédac chef Sonia Grdovic demande si quelqu'un a vu ce film et veut faire un article. Je me dis que je pourrais en parler. Mais je me dis que je ne me souviens que du noir. Alors, j'entreprends des recherches sur l'homme. Internet évidemment, les cahiers du cinéma pour sa dernière oeuvre inachevée. J'apprends, je découvre. Je retourne voir le film.

De noir, je passe à gris et je me mets même à distinguer des couleurs. Les couleurs de ces petites lucioles que je cherchais. Je vois mieux. Je comprends mieux.

J'aimerais donc vous parler d'un film : "Pasolini" d'Abel Ferrara. Il fut pour moi une luciole. Puisse-t-il l'être un peu aussi pour vous.

 

Voici l'histoire d'un homme. Voici une histoire ancienne. Mais...voici une histoire à la résonnance tragiquement actuelle.

Pasolini, intellectuel italien, tour à tour écrivain, cinéaste, chroniqueur, poète.

Pasolini, homme révolté, homme passionné, homme éreinté.

Pasolini admiré et détesté.

« Pasolini », dernier film d'Abel Ferrara, avec Willem Dafoe.

Le cinéaste abonné à « la fiction des derniers jours de » nous embarque ici pour Rome, découvrir la dernière journée de Pier Paolo Pasolini dans sa vie quotidienne jusqu'à sa mort survenue en 1975, avant la sortie de son dernier film «Salò ou les 120 journées de Sodome » (libre adaptation de Sade).

Au cœur de cela donc, un homme, une oeuvre, des convictions, des passions et un combat : être libre. Libre de penser, de parler, de créer, de protester, de contester.

Son assassinat – aujourd'hui encore non élucidé – est un symbole.

Pasolini dérangeait. Il dérangeait de part son œuvre cinématographique, radicale, de part ses prises de positions politiques et sociétales, sans concession.

Ferrara nous invite à découvrir l'œuvre inachevée de Pasolini - quelques scènes de son dernier projet de long métrage «Porno-Teo-Kolossal » -  par ce qu'il se passe dans son cerveau au moment de mourir. Une mise en abîme onirique. Il redonne vie aux ultimes travaux de Pasolini et les projette dans l'avenir.

Il nous montre tour à tour "un homme vieillissant, un fils à maman, un artiste bourreau de travail, un ami choyé, un agitateur éreinté, un ogre aussi"  : un Pasolini libre et las. Un homme qui aura connu le fascisme et une nouvelle forme de fascisme : celui de la société de consommation qui aura abîmé, selon lui, l'Italie et l'amour qu'il lui portait.

Pasolini-l'homme est mort mais Pasolini-le contestataire est toujours vivant.

Vivant grâce à la résonance de ses articles tels que « La disparition des Lucioles » (Il Corriere-1975) : critique sur le vide du pouvoir en Italie et sur la consommation, « le nouveau fascisme culturiscide ».

Vivant grâce à la résonance actuelle de son dernier film « Salò ou les 120 journées de Sodome »  et de sa critique du pouvoir absolu et de la déshumanisation qu'induit le consumérisme.

Vivant grâce à Abel Ferrara.

Vivant grâce à la liberté d'expression (son dernier film fut longtemps censuré). Et ça ne doit jamais s'arrêter : Pasolini est mort, vive Pasolini !

Vivant aussi pour rappeler que la libre expression est un droit absolu et que les derniers événements survenus à Paris, nous font mal.

Pour Pasolini, la disparition des lucioles est une métaphore. Celle des lumières qui peuvent nous guider dans l'obscurité immense de l'inculture et de la barbarie.

 

Il finit en disant : « Je donnerais tout pour une Luciole. »

Battons-nous, pour que, éternellement vivants demeurent les défenseurs de la démocratie !

Merci à tous ces hommes, ces éclaireurs éclairés....ces semeurs de lucioles et de liberté.

Bonus Track, Une Vie une oeuvre, France Culture 1992 "Pasolini, une vitalité désespérée" http://www.mediafire.com/?c7yfath5274ey9y

 

 

Adèle, aux Urbains de Minuit, revendiqués lucioles !

1 commentaires
Le 0000-00-00 00:00:00 par Narki Nal
Moi que les lucioles fascinent, je les regarderai avec encore plus d'émerveillement dorénavant.
Numéro : 50 -